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 La voiture Anglaise

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5 participants
AuteurMessage
orangemecanic

orangemecanic


Messages : 2187
Date d'inscription : 10/01/2011
Age : 66
Localisation : Eure et Loir

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MessageSujet: La voiture Anglaise   La voiture Anglaise EmptyMar 16 Déc - 11:15

La voiture anglaise est peut-être une idée, ou bien une réflexion sur le monde, ou encore
un point de vue sur l'existence, mais certainement pas un moyen de transport.
Acquérir un engin de cette sorte signifie implicitement renoncer une fois
pour toutes à la conduite automobile.

Car une voiture anglaise n'est pas faite pour rouler.
Elle n'a jamais été conçue ni construite pour cela.
En revanche - ceux qui en possèdent l'attestent avec l'œil brillant des flagellants -,
elle a été savamment mise au point pour vous compliquer la vie,
ruiner graduellement votre confiance, votre épargne, tout en salissant sournoisement votre garage.

C'est bien le propre d'une voiture anglaise - quelle que soit son extraction - que de goutter,
de suppurer, de perdre toutes sortes de liquides lubrifiants ou refroidissants.

A voir ces traces brunâtres et récurrentes sur les sols des abris, on dirait que le moteur
ou la boîte ont été pensés, imaginés autour de la fuite, dessinés pour sublimer
ce goutte-à-goutte têtu et raffiné dont aucune clé, fût-elle six pans, ne vint jamais à bout.

En fait, tout se passe comme si les Anglais avaient fabriqué des voitures humides
pour se fondre dans les rideaux de pluie. En réalité, les Britanniques ont inventé
la voiture domestique, cette sorte d'animal mécanique qui déteste faire de l'exercice
mais n'aime rien tant que de vieillir au plus près des hommes.

Tout en gardant une certaine valeur.
Car, si les anglaises flanchent sur les déplacements, elles ont en revanche le mérite
de devenir souvent avec l'âge de bons petits placements.

Si on la considère de ce point de vue - celui de l'énurétique animal de compagnie -,
la voiture anglaise prend alors du sens.
Je parle bien évidemment là des véritables anglaises d'époque, et non point
de ces mauvaises répliques d'aujourd'hui assemblées par de bien peu fantaisistes
repreneurs américano-germaniques.

Je parle de celles dont la première craque, dont la seconde, troisième et quatrième
ne passent pas, celles qui ne démarrent jamais le matin et rarement le soir,
celles qui sont équipées de carburateurs SU, d'allumeurs Lucas, et de compteurs Smith,
et d'overdrive Laycock, autant d'équipements funestes mis au point
par des compagnies loufoques, malfaisantes et nuisibles qui ont cependant, un temps,
fait la gloire et conforté l'image de l'industrie automobile outre-Manche confite
dans les plis de ses cuirs. Je parle de toutes ces voitures splendides
qui flattaient l'œil autant que l'odorat.


Lorsque l'on s'asseyait à l'intérieur de ces berlines, de ces coupés ou de ces cabriolets,
il s'en dégageait toujours une odeur de sous-bois, un parfum indéfinissable,
mélange de pourriture noble, de moquette humide et d'huile de boîte rancie.

Bien sûr, chaque marque, chaque modèle avait sa propre fragrance, mais il demeurait une base,
une effluence commune.

Et c'est là, dans la position du rêveur flairant, que vous perdiez la tête, la narine frémissante,
la main flattant le comodo, l'œil voletant sur l'érable moucheté et les chromes des poignées.

Et vous fermiez les yeux, et vous aviez des grillons dans la tête, et quelque chose
vous disait que vous alliez parcourir le monde dans ce canapé à ressorts hélicoïdaux
dont le marchand ne cessait de vous vanter la souplesse.

Et vous faisiez alors un chèque, un chèque sans fin, pour acquérir à la fois une nationalité
qui vous était étrangère et un sentiment d'îliens qui n'avait qu'un lointain rapport avec la mer.

Et vous pensiez acheter une Jaguar, une MG, une Triumph, une Sunbeam, une Borgward,
ou une Healey, bref un petit peu plus qu'une automobile, alors que vous veniez
de devenir propriétaire d'une tonne d’emmerdements équitablement répartis sur chaque essieu.

Mon garagiste spécialisé me parle souvent des Jaguar XJ 6.
Il les parque toutes dans le même coin de son atelier, sorte de pavillon des contagieux,
et les appelle ses boîtes à chagrin.

" Quand on voit comment c'est fabriqué, on se demande comment ça peut rouler.

Mon garagiste est un homme pragmatique.
Quand il évoque la XJS 12, il dit : " La six, c'était un six-cylindres.
La 12, je vous laisse faire le compte, c'est les mêmes soucis multipliés par deux.

Et pourtant, si l'on considère ces voitures pour ce qu'elles sont, des véhicules de garage,
des pur-sangs immobiles, des petits salons d'ambassade, des fragments de Commonwealth,
des exercices d'ameublement, des coques d'élégance, des noyaux de bon goût, alors, tout va bien.

C'est lorsque vous mettez le contact et que vous ambitionnez de vous rendre d'un point
à un autre que l'exercice se gâte et que la machine se grippe. Je sais de quoi je parle.

J'ai pratiqué ce sport qu'est la panne anglaise durant une quinzaine d'années.
J'ai été successivement trahi par deux Austin 1300, abandonné par une TR4 IRS,
plaqué par une Sunbeam, ridiculisé par une Triumph Vitesse 6, humilié par une MGB
qui alla jusqu'à s'enflammer, spontanément, moteur coupé, à l'arrêt, dans le garage.

Toutes ces voitures ont passé plus de temps chez le réparateur qu'avec moi sur les routes.

Toutes étaient séduisantes au point qu'après chaque panne j'avais la conviction
que nous repartions, elles et moi, sur de nouvelles bases.

Toutes avaient cette odeur caractéristique qui inspirait confiance.

Toutes étaient splendides sous la pluie. Toutes rouillaient inexorablement.

Toutes avaient quelque chose d'humain. Toutes m'ont lâché du jour au lendemain.

Ce n'est que vers la fin que j'ai compris l'usage qu'il fallait faire de ces fauteuils de jardin.
Le soir, je sortais le cabriolet sur la pelouse, j'abaissais la capote, j'allumais une cigarette
et la radio, puis, voyageur immobile, je fumais en regardant passer l'été dans le ciel.

Aujourd'hui, j'ai fait l'acquisition d'un petit roadster japonais. Il est parfaitement étanche.
Le matin, je démarre, été comme hiver. Le mélange air-essence est géré par un processeur.
Le chauffage chauffe, le ventilateur souffle, les vitesses passent en douceur,
la consommation est raisonnable, la tenue de route irréprochable.

Je ne fréquente plus aucun mécanicien. J'ai annulé mon assurance dépannage.
Bref je roule en automobile. Autrement dit, je m'em......."    
lol!
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la grenouille

la grenouille


Messages : 67
Date d'inscription : 24/12/2012

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MessageSujet: Re: La voiture Anglaise   La voiture Anglaise EmptyMar 16 Déc - 20:59

Excellent!
Mais.............si si, la voiture anglaise peut être un moyen de transport, mais cela dépend se que l'on pense être le plus important: La destination ou le VOYAGE! et là par contre si ton bonheur se trouve dans ton temps passé sur la route ( voir au bord ) tu n'es pas loin d'avoir chaussure a ton pied.
LA PANNE; on devrait faire l'apologie de la panne, ce moment très particulier ou la voiture marche comme un avion pour la première fois et que tout s’arrête brutalement laissant d'un coup plus que le bruit assourdissant des grillons au milieu de rien! Ce moment ou l'on prend subitement la dimension de son environnement, le moment ou on va aller à la rencontre d'un autochtone qui va pouvoir vous aider.
( Au fait, j'ai oublié, si vous voulez profiter de l’intérêt d'une anglaise, oubliez portable et assistance )  
En plus de ces merveilles, vous pouvez aussi avoir le pote qui va avec, celui qui vous accompagne immédiatement au bout du monde sur un coup de fil, juste parce qu'il a réussi a démarrer sa fidèle monture et qu'ainsi il n'y a aucune raison pour qu'elle s’arrête!
Il vous dira en cas de panne; par exemple de nuit au milieu de rien en plein hiver que de toute façon une bonne révision ne sera pas inutile. ( c'est du vécu ); ça aussi un compagnon de voyage qui sait tout, qu'a tout prévu, qu'a la solution à tout tout le temps, c'est emm.......t
Et pis les souvenirs drôles a racontés avec quatre grammes, faut d'abord les vivre! Laughing
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mucien2

mucien2


Messages : 117
Date d'inscription : 01/11/2013

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MessageSujet: Re: La voiture Anglaise   La voiture Anglaise EmptyMar 16 Déc - 21:15

Cherchons la petite bête... Citer Borgward me semble légèrement hors sujet! Very Happy
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resonance 94

resonance 94


Messages : 2646
Date d'inscription : 29/05/2012

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MessageSujet: Re: La voiture Anglaise   La voiture Anglaise EmptyMer 17 Déc - 14:17

Merci Gilles cheers
c'est tellement vrai
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Baboon
Administrateur
Baboon


Messages : 3961
Date d'inscription : 11/11/2008

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MessageSujet: Re: La voiture Anglaise   La voiture Anglaise EmptyMer 17 Déc - 20:30

Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy Very Happy

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